Vaste trafic de déchets entre la Belgique et la France : Neuf hommes condamnés à des peines allant jusqu’à cinq ans de prison
Le tribunal correctionnel de Lille a rendu son verdict dans une affaire de trafic de déchets entre la Belgique et la France, condamnant neuf hommes à des peines de prison allant jusqu’à cinq ans, pour un procès qualifié d’inédit compte tenu de la nature très lucrative de ce type de trafic.
Des peines prononcées pour un trafic de déchets en bande organisée
Neuf hommes, dont cinq appartenant à la même famille, ont comparu devant le tribunal correctionnel de Lille pour leur participation à un trafic de déchets en bande organisée entre la Belgique et la France. Ce trafic a conduit au déversement illégal de quelque 10 000 tonnes de déchets belges sur le territoire français pendant la période s’étalant de 2018 à 2021.
Johnny Demeter, considéré comme le principal acteur de ce réseau, a écopé d’une peine de cinq ans d’emprisonnement, assortie de la révocation de deux ans de sursis prononcés à son encontre en 2016. Son avocat, Quentin Lebas, a exprimé son insatisfaction quant à la lourdeur de cette peine, bien qu’elle soit inférieure à la réquisition de six ans. Il a également laissé entendre que son client se réservait le droit de faire appel de cette décision.
Les autres prévenus, dont certains font partie de la famille Demeter, ont été condamnés à des peines allant de 18 mois à trois ans de prison ferme. Le dernier prévenu s’est vu infliger la confiscation de sommes obtenues grâce à ce trafic. En outre, Johnny Demeter, en plus de l’emprisonnement, a été condamné à une amende de 50 000 euros, à une interdiction définitive de gérer une entreprise de déchets, ainsi qu’à la remise en état du site de Rédange (Moselle) où environ 250 tonnes de déchets belges restent à traiter, sous astreinte de 150 euros par mois.
Réactions suite aux condamnations
Suite à ces verdicts, un porte-parole du collectif “J’aime ma forêt”, ayant lancé l’alerte, s’est exprimé en déclarant sa satisfaction concernant les peines prononcées, espérant qu’elles dissuaderont d’autres individus de se livrer à de telles activités. Cependant, il a fait part de ses inquiétudes quant à la capacité des condamnés à remettre le site en état, étant donné que ces derniers se trouvent actuellement en situation d’incarcération et pourraient ne pas disposer des ressources financières nécessaires.
Un système élaboré de trafic de déchets
Le fonctionnement de ce réseau de trafic de déchets consistait initialement à acheminer des tonnes de déchets belges dans des centres de traitement français, en utilisant des fausses identités d’entreprises et sans effectuer de paiements. Ultérieurement, des camions ont été employés pour déverser illégalement ces déchets dans des zones frontalières de la Lorraine. De plus, des terrains dans le nord de la France ont été loués pour y abandonner d’autres déchets.
Lors de l’enquête, l’ampleur des dépôts sauvages de déchets industriels et ménagers en Lorraine a été constatée à l’aide d’un hélicoptère. Par exemple, à Rédange, où les déchets se trouvent à quelques mètres de la frontière luxembourgeoise.
Ce procès s’est déroulé devant la Juridiction Interrégionale Spécialisée, une première en France dans une affaire de trafic de déchets. La procureure a souligné que ce type d’activité générait des gains au sein de l’Union européenne, équivalents à ceux engendrés par le trafic de stupéfiants, tout en présentant un risque pénal moindre.
En outre, la plupart des prévenus ont été condamnés à verser, globalement, des centaines de milliers d’euros de dommages et intérêts à des sociétés telles que Suez et d’autres entreprises escroquées, à des associations de protection de l’environnement, ainsi qu’à la commune de Rédange. Ces montants, bien que potentiellement irrécouvrables, ont été qualifiés de symboliques par l’avocate des associations et de la commune de Rédange, Muriel Ruef, soulignant ainsi la réponse ferme du tribunal face à ce type d’infraction.
Évolution du mode opératoire et caractéristiques de la criminalité organisée
Au fil du temps, le mode opératoire de ce réseau de trafic de déchets a évolué. Initialement, les déchets belges étaient acheminés vers des centres de traitement en France, en utilisant de fausses identités d’entreprises et sans effectuer de paiements. Lorsque les sociétés impliquées, telles que Suez et Veolia, ont commencé à découvrir la supercherie, le réseau a opté pour des dépôts sauvages en Lorraine. Par la suite, face à l’accroissement des risques, ces individus ont choisi de louer des terrains et des entrepôts dans le nord de la France, encore une fois en utilisant de faux documents.
Il est apparu durant l’enquête que cette affaire présentait des caractéristiques de la criminalité organisée, appliquées au domaine des déchets. Muriel Ruef, avocate des associations de défense de l’environnement, a souligné les conséquences néfastes de ces agissements sur l’environnement, évoquant notamment les risques de pollution des nappes phréatiques, d’incendies, ainsi que les menaces sur la biodiversité.
Le trafic de déchets entre la Belgique et la France constitue un exemple flagrant de l’ampleur des enjeux liés à la protection de l’environnement et à la lutte contre les activités illégales causant des dommages écologiques et économiques considérables.